jeudi 30 mai 2013

Le capitaine se décapsule une petite bière.


ILDA

J’ai toujours connu Ilda. Nous sommes nés dans le même quartier et dès ma plus tendre enfance, j’ai éprouvé pour elle un doux sentiment.

Ilda était une fille remarquable, effrontée et intrépide qui s’adonnait aux activités sportives les plus osées.
Nos parents étaient amis et nous nous retrouvions parfois en fin de semaine. Ilda venait dormir à la maison.


Son père nous apprenait à nager, nous étions inséparables.
Jusqu’au jour où j’appris qu’Ilda était partie en retraite dans un couvent à Biarritz 
et qu’elle voulait devenir nonne.

Fou de douleur, je m’enfuis pour le Japon où je cherchais l’oubli dans une communauté de prêtres bouddhistes. Moi aussi j’avais droit à mon expérience mystique.
Ma vocation religieuse n’étant pas avérée, je rentrais au pays où j’ouvris une échoppe de savetier au cœur de la cité.

Mon commerce marchait bien hormis les reproches du voisinage qui ne supportait pas l’odeur des savates. Que pouvais-je y faire si mes clients puaient des pieds?

Un beau jour, à ma grande surprise, je croisais Ilda dans un bar. Elle était belle, la religion l’avait lassée et elle cherchait à se faire une place au soleil.
Je retrouvais mon Ilda, intrépide et fougueuse pratiquant des activités physiques risquées voire douloureuses.
Ilda me dit qu’elle aimait ça les pratiques douloureuses, qu’elle en faisait commerce à ses heures lors de soirées SM et qu’avec l’argent ainsi gagné, elle pourrait s’offrir le salon de coiffure de ses rêves.

Je ne comprenais rien à ces pratiques mais constatais qu’Ilda pût rapidement ouvrir son salon de coiffure.
Nous vécûmes alors une folle période amoureuse.
Jusqu’au jour où Ilda en eût marre et décida de s’émanciper. Je ne savais pas de quoi elle voulait parler mais plus belle que jamais, elle quitta la maison et disparut dans la foule.
Ilda rejoignit le mouvement de suffragettes qui revendiquait l'égalité des sexes, le droit de vote pour les femmes, le droit à la contraception et toutes ces choses totalement communistes.

Furieux quand on s’attaque aux valeurs et au fondement même de notre civilisation, j’allais illico corriger Ilda dans son local de suffragettes. Elle s'en souviendrait longtemps!
Ilda s’en souvint et le soir même elle me chassa de sa vie sans écouter mes arguments politiques et mes revendications d’homme blessé.

Désemparé, je décidais d’utiliser le même procédé que les féministes pour faire entendre ma voix et me lançais dans la politique. Comme Ilda, je m’inscrivis dans un mouvement de suffragettes.
La presse étant le meilleur endroit pour être au coeur des luttes politiques, je devins journaliste. Plus précisément photographe de presse. Je pus dès lors me consacrer à ma passion du sport et suivre les tournois de tennis dans le monde entier. Les tournois féminins surtout.
FIN